Découverte historique du Sabarthès et de Tarascon sur Ariège
Petite
définition
On appelle "blason" ou science héraldique, l'étude des armoiries "emblèmes en couleurs, héréditaires ou constants, propres à des familles ou à des communautés, parfois exceptionnellement à des individus.
Depuis un temps immémorial, l'usage du blason comme marque distinctive et exclusive a été adopté non seulement chez les combattants appartenant à des familles nobles, puis chez les clercs, les bourgeois et même les artisans. Ainsi devenu général et répandu, beaucoup de villes adoptèrent des signes particuliers qu'elles faisaient graver sur des médailles, des sceaux et des monnaies. Mais ces marques symboliques, empreintes sur la cire ou sur le bronze, ne doivent pas être considérées comme des armoiries ; elles n'en ont en aucune façon les caractères distinctifs. Il est un point qu'il importe de spécifier : on définit dans les armoiries, l'écu et les accessoires.
Les armes d'une ville se disposent sur un écu, dont le dessin a souvent varié au cours de l'histoire. L'écu de Tarascon est dit "français" et rappelle le bouclier au temps des guerres de Croisades, sa forme est elliptique et se termine vers le bas en pointe arrondie. L'écu se compose d'un emblème : un château.
Ainsi, c'est l'écu et seulement lui qui constitue le blason, lui seul est sacramentel ; les parties accessoires sont les couronnes murales, les supports, les légendes et les devises. On a donné des formes très variées aux couronnes murales, elles ont dans les armoiries de Tarascon cinq tours. Il n'y en avait pas dans les anciens blasons, leur ajout à l'écu est plus tardif. Les supports sont variés et la devise est très contemporaine.
« »
Cette devise n'a aucun lien avec le blason, elle a un caractère strictement décoratif. L'écu seul compte, tout le reste n'est que fioritures et fantaisies du peintre ou du graveur.
L'épisode révolutionnaire de 1789 supprima évidemment en masse toutes les armoiries, il n'y eut aucun blason Tarasconnais pendant la République (les représentants du peuple possédaient un unique et simple cachet représentant la déesse de la Liberté avec comme mention laconique: Représentants du peuple français). Durant cette époque, blasons et armoiries rappelaient de trop mauvais souvenirs: ceux de l'Ancien Régime, que tous préféraient oublier...
Pourtant Napoléon Ier , désireux de satisfaire hommes et communautés, s'attacha à remettre à l'honneur une pratique très appréciée, et cela d'autant plus qu'elle était lucrative pour les finances de l'empire. En 1809, il décida que les villes qui en feraient la demande en Conseil d'état seraient dotées d'armoiries. Tarascon ne souscrit pas à cette démarche.
Sous la Restauration, Louis XVIII décida en 1814 que toutes les villes de France reprendraient les armoiries attribuées par les rois. Le conseil municipal de Tarascon eut cependant l'idée de solliciter auprès du roi une modification.
En effet, au moment où des démarches furent faites pour obtenir le droit de reprendre les anciennes armoiries, le Conseil municipal sous la présidence de M. Estébe Maire , dans la séance du 23 mars 1817, proposa les suivantes, dont on avait conservé le souvenir à Tarascon : « … considérant que la ville de Tarascon, une des quatre villes maîtresses du ci-devant Comté de Foix avait en cette qualité obtenue un armorial des anciens rois de Navarre Comtes de Foix, cet armorial existait encore en 1789, tel qu’il est décrit ci après suivant les termes du blason, et dont le plan figuratif de l’écusson sera attaché à l’extrait de la présente, l’armorial décrit comme ci-après :
Ecartelé au premier de gueules, à la tour crénelée d’argent, maçonnée de sable, qui est de Tarascon ; au second, d’or à trois pals de gueules, qui est de Foix ; aux troisième et quatrième, d’azur, à deux vaches d’argent, posées l’une au-dessus de l’autre , alaisées, la tête tournée vers le centre, qui est de Béarn ;
Sur le tout, d’azur à trois fleurs de lis
d’or ; qui est de France et qui fut adapté à l’armorial, à l’époque ou la Navarre et le comté de Foix ont passé à la couronne de France. L’écusson est surmonté d’une couronne de comte et
posée sur deux palmes croisées derrière, dont les bases font saillie de chaque côté de la pointe inférieure et les sommités sortant à chacun des angles supérieurs, en se recourbant légèrement en
dehors de l’écu…».
Les armoiries, propres à Tarascon auraient donc été : de gueules, à la tour crénelée d’argent, maçonnée de sable. Cette description ne figure pas sur l’armorial Général des d’Hozier de 1697.
« … l’assemblée regrette de ne pouvoir fournir les titres, chartes ou lettres patentes pour lesquelles on avait accordé cet armorial ; attendu que les archives de la ville ont été entièrement spoliées pendant le cours de cette longue et pénible révolution, perte irréprochable pour la ville qui ne peut en être dédommagée que par les bontés du Roi à mesure quelle sera dans le cas d’y recourir, comme dans cette circonstance. ».
Les armoiries proposée par le conseil municipal furent donc soumises à la Commission de Sceau à Paris. Mais, le Préfet de l’Ariège informa le maire de Tarascon , par sa lettre du 15 septembre 1817, que cette même commission avait trouvé dans l’Armorial Général du Languedoc, et dans celui de Toulouse, que les armoiries de Tarascon avaient été réglées par messieurs les commissaires généraux, le 11 mars 1701, ainsi qu’il suit : « D’azur à un château d’argent ; environné de deux branches de laurier passées en sautoir, en chef et en pointe.
En conséquence, la commission du sceau se refuse à accorder d’autres armoiries que celles ci-dessus à moins que vous ne puissiez justifier de la possession ancienne des autres armoiries par la production de quelques actes revêtus du sceau des dites armoiries…alors elle reviendrait sur la première décision, attendu que l’écu de France ne peut être conservé ou accordé qu’en vertu de grands services dont cet écu serait la récompense et perpétuerait le souvenir. ».
Suite à cette lettre le Conseil Municipal, entre en délibération le 19 septembre 1817, et décide que : « Considérant qu’il à équivoqué en demandant par cette délibération précitée, les armoiries de la ville, telles quelles étaient décrites dans la dite délibération, ; que ces armoiries sont celles du ci-devant comté de Foix, et non celles de la ville de Tarascon. et reconnaissant l’impossibilité de se procurer des titres à l’appui de sa demande contenue dans la délibération du 23 mars dernier, se détermine à demander les armoiries réglées en 1701. Qu’il y à d’autant moins de doute à cet égard, qu’elles se trouvent parfaitement conformes à un sceau sur cire, remis sur le Bureau par un des membres du conseil, qui la trouvé par hasard dans ses papiers. »
Toutefois, il faudra attendre le 16 octobre 1817 pour que les armoiries soient enregistrées par lettres patentes. La ville fut autorisée à reprendre le blason tel qu’il était représenté sur l’Armorial Général du Languedoc.
Enigme : le timbre sec de 1682
Nous avons retrouvé un document des consuls de Tarascon aux Archives départementales de l’Ariège relatif à l’hôpital
Saint-Jacques dont la description est celle-ci :
Timbre de forme ovale (2.5 cm H) qui représente un château à trois tours qui surmonte 3 fleurs de lys, 3 bandes horizontales et 2 vachettes, le tout entouré d’un rameau de laurier à gauche et de l’inscription Tarascon à droite.
Ce sceau unique par ailleurs, est à la fois mystérieux et riche d’informations, car l’on retrouve dans celui-ci un mélange des possibles armoiries de Tarascon.
Aujourd’hui le vieux blason des comtes de Foix, en partie détruit (martelé par
le temps ou les hommes) figure en bonne place au dessus de la porte de la tour du Castella. Autrefois, il surmontait l’ancienne porte dite « de Foix ». Cette porte, au bas de la rue du
Barry s’ouvrait au nord de la ville de Tarascon sur la place du faubourg Saint-Jacques. Elle fut démolie en 1775 et une partie des matériaux servirent à la construction de l’actuelle tour du
Castella, et à la réparation de la porte d’Espagne située au sud.
Il est écartelé : au 1 et au 4, d’or, à trois pals de gueules qui est de Foix ; et au 2 et au 3, d’or, à deux vaches posées l’une au-dessus de l’autre, la tête tournée vers la gauche qui est de Béarn.
Ce blason contient les armes communes à tous les comtes de Foix depuis le mariage de Roger Bernard III avec
marguerite de Béarn, héritière de cette Vicomté.
Pour terminer, il faut souligner que les armoiries municipales font partie du patrimoine incorporel et moral de la cité. Elles n’appartiennent pas au domaine public ou privé de la ville. Elles n’ont qu’une valeur symbolique, elles sont un signe de reconnaissance mais elles n’ont pas de valeur juridique comme ce fût le cas sous l’ancien régime.
Robert-Félix Vicente
Sources :
- AD09 -1 Per 3, tome 3
- AD09 - 135 EDT D1 (séance du Conseil municipal, 23 mars
1817)
- AD09 - 4 T3 (dossier commune)
- AD09 H 199 (dossier hôpital de Tarascon)
- Dr. P. Courent. Armorial du Comté de Foix et de la Vicomté
de Couserans (1938).
- Y.A. CROS du Cercle Généalogique du Languedoc.